Dans une étude récente, l’OCDE confirme deux évolutions sur lesquelles les syndicats attirent l’attention depuis quelques années déjà :
- les salaires ne suivent plus les hausses de productivité ce qui entraîne une diminution de la part des salaires ;
- l’inégalité entre les plus hauts revenus et les revenus médians continue de s’accroître.
La Commission européenne fournit en outre la preuve que l’accord interprofessionnel conclu jette les bases pour une plus grande croissance économique en 2017 et 2018 et que les salaires sont plus que jamais le moteur du développement économique.
Dissociation entre salaires et productivité
Une étude de 24 pays de l’OCDE fait apparaître que les salaires ne suivent plus la productivité. Un constat qui avait déjà été évoqué précédemment par le FMI, mais qui est maintenant confirmé. Le graphique ci-dessous montre que depuis 1995, la productivité a augmenté de 27% en moyenne, pour l’ensemble de l’économie, dans les 24 pays étudiés. Sur la même période, les salaires moyens (ligne bleue) n’ont augmenté que de 22%.
Une dissociation de la productivité et des salaires entraîne une part des salaires en baisse. Ceci indique un déséquilibre entre la rémunération du capital d’une part (employeurs et actionnaires) et la rémunération du travail (travailleurs) d’autre part. L’effet d’une part des salaires en baisse n’est pas négligeable. Il ressort d’une étude des Pays-Bas qu’une diminution de la part des salaires d’1 % freine la croissance économique d’environ 0,25 %. Sur la période 1995-2013, la part des salaires a baissé de 1,3 % en moyenne. De ce fait, la croissance économique européenne a été de 0,35% inférieure en moyenne chaque année.
Autre élément inquiétant : l’écart qui se creuse entre le revenu moyen et le revenu médian (ligne noire). Plus l’écart entre les deux devient important, plus la répartition des salaires est inégale (principalement les 1% des salaires les plus élevés par rapport au reste des travailleurs) et plus l’inégalité augmente.
Quel est l’effet sur les parts des salaires par pays ?
En Belgique, entre 1995 et 2014, la part des salaires a diminué de 4% dans le secteur privé. La comparaison ne porte que sur la période jusque 2014, moment où le saut d’index a été introduit et où un quasi gel des salaires a été imposé. Pour la période 2014-2016, on peut donc s’attendre à une nette diminution de la part des salaires. Si l’on applique la moyenne européenne à la Belgique, on en arrive à la conclusion que chaque année, la Belgique a raté 1% de développement économique à la suite de la diminution de la part des salaires.
Enfin, l’OCDE souligne clairement, comme les économistes néerlandais cités plus haut, que l’inégalité croissante et l’écart de plus en plus grand entre la productivité et les salaires ne peuvent s’expliquer uniquement par la mondialisation et les changements technologiques. La politique est aussi un facteur déterminant. Une politique qui, ces 20 dernières années, s’est surtout concentrée sur la dérégulation du marché du travail et qui s’est opposée aux syndicats et aux négociations collectives, au profit du capital.
Les salaires, moteur de l’économie belge dans les deux années à venir
La Commission européenne confirme que les salaires jouent le rôle de force motrice dans le développement économique d’un pays. Dans ses prévisions d’hiver 2017, elle montre que l’économie belge continue à prester en-dessous de la moyenne européenne en termes de croissance économique. Et ce sera également le cas en 2017 et en 2018.
Avec les milliards qui ont été donnés en cadeau aux employeurs ces derniers temps, on pourrait s’attendre à ce que la croissance économique soit surtout soutenue par plus d’exportations. Or, c’est l’inverse qui se produit, comme le montrent les données ci-dessous.
La croissance belge en hausse s’explique quasiment intégralement par la consommation intérieure. La Commission européenne estime que la croissance de cette consommation intérieure doublera en 2017 et en 2018 par rapport à 2016. Selon la Commission, ‘le moteur sous-jacent de la croissance se déplace de plus en plus vers la demande intérieure (…)”. La Commission souligne par ailleurs que “la combinaison de la reprise de l’indexation automatique et de la marge réelle pour des augmentations salariales en 2017-2018 fait augmenter le revenu des travailleurs.”
En d’autres termes, s’il n’y avait pas d’augmentations salariales prévues dans les deux années à venir, l’économie belge se porterait encore bien plus mal. Ce gouvernement va-t-il enfin comprendre que les salaires sont un facteur crucial pour le développement économique et que freiner l’augmentation salariale a des conséquences néfastes pour une économie dans sa totalité ?
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